1- Rappels :
1-1-quotient de réaction :
Nous avons vu dans les chapitres précédents qu’à toute
réaction chimique on pouvait associer à chaque instant un quotient de réaction
Qr, traduisant la position du système chimique entre les états final
et initial. Ce quotient se calcule à
partir de contributions propres à chaque espèce (concentration pour les espèces
solvates, par exemple). La méthode de calcul de ce quotient est donnée au
l’article de état d’équilibre d’un système chimique,
Plus le quotient est élevé, plus le système contient de
produits par rapport aux réactifs. Moins le quotient est élevé, plus le système contient de réactifs par
rapport aux produits. Ainsi le quotient d’une réaction qui ne s’est pas encore
déroulée et dont aucun produit n’est encore présent dans le milieu réactionnel,
est-il égal à 0.
1-2- constante de réaction :
Nous avons encore vu que pour toute réaction chimique, il
existait une valeur privilégiée du quotient de réaction, appelée constante de
réaction K. quel que soit l’état initial du système chimique, la réaction à
laquelle il va donner lieu se fera
toujours en sorte qu’à l’équilibre, le quotient de réaction prenne cette valeur. Cette valeur ne dépend que de la
température du système. En particulier, elle est indépendante de l’état initial
du système chimique.
Cependant, il existe plusieurs jeux de contributions
permettant à Qr de prendre une certaine valeur K. Ainsi, par
exemple :
(5x24)/4=120=(4x90)/3
Les valeurs de ces contributions à l’équilibre seront,
elles, fixées par l’état initial du système qui définira les quantités de
matière disponibles pour la réaction/
1-3-objectif :
Nous allons voir à présent comment prévoir les sens
d’évolution d’un système chimique, c'est-à-dire, à partir de la seule donnée de
son état initial et de la constante de la réaction à laquelle il donne lieu,
déterminer son état final.
Cette démarche est essentielle dans le travail du chimiste,
afin de pouvoir orienter au mieux son travail.
2- Sens d’évolution :
2-1- critère d’évolution :
La constante de réaction associée à une réaction chimique
est une valeur particulière du quotient
Qr. elle traduit l’état dans lequel va se fixer le système à
l’équilibre, la position, entre réaction nulle et réaction totale, où les
réactions inverses se compensent exactement, et où le système n’évolue plus
macroscopiquement.
Pour savoir comment le système évolue, la méthode est
simple : on commence par déterminer le quotient de réaction au tout début
de la réaction. Attention, la chose n’est pas forcément des plus simples :
on peut très bien avoir déjà dans le milieu réactionnel des espèces qui vont
être synthétisées au cours de la réaction (dissolution d’acide éthanoïque
dans une solution d’éthanoate de sodium,
par exemple). On compare ensuite cette valeur à celle de la constante de
réaction K. on a alors (fig1)
-
Si Qr< K : c’est que le
système est à gauche de sa position d’équilibre : les réactifs sont trop
présents par rapport aux produits. Ils vont donc réagir entre
eux, jusqu’à ce que le milieu réactionnel contienne suffisamment de
produit et suffisamment peu de réactifs
pour que la réaction inverse compense la première.
-
Si Qr = K, c’est que le système
chimique est exactement dans sa position d’équilibre chimique : le
rythme auquel les réactifs donnent les
produits est d’ores et déjà exactement compensé par le rythme auquel se fait la
réaction inverse. Le système ne subit aucune évolution macroscopique.
-
Si Qr>K : c’est que le
système est à droite de sa position d’équilibre : on l’a placé dans une
position exagérée d’avancement, dans laquelle les produits sont trop présents,
et les réactifs trop peu, pour que les réactions se compensent. C’est donc la
réaction inverse qui va prendre le pas sur la première, jusqu’à ce que le
milieu réactionnel contienne suffisamment de réactifs pour compenser la
réaction inverse.
2-2- perturbation d’un système à l’équilibre :
On peut se servir de ce critère d’évolution pour déterminer
par exemple, l’évolution d’un système initialement à l’équilibre, et dont on retirerait
une espèce du milieu réactionnel. Supposons par exemple que nous retirions par
un procédé quelconque, les ions éthanoate CH3COO- de la
solution aqueuse d’acide éthanoïque précédemment mentionnée. Intuitivement,
nous voyons que la réaction inverse de la dissociation des molécules d’acide CH3COOH
ne compense plus cette dissociation, qui va donc pouvoir reprendre de plus
belle. Donc nous nous attendons à ce que l’évolution spontanée du système suite
à cette perturbation aille vers la droite.
Si nous prenons le point de vue du quotient réactionnel,
nous avons supprimé un produit du milieu réactionnel, et avec lui sa
contribution à Qr, qui devient donc égal à 0 en début de réaction.
Comme la constante de réaction de l’acide éthanoïque avec l’eau est égale à 10-4,8,
nous pouvons écrire que Qr<k, donc que le système va évoluer vers
la droite, c'est-à-dire vers une dissociation de l’acide, ainsi que nous
l’avions prévu.
Ce type de méthode est souvent utilisé, pour des réactions
de synthèse aboutissant à un équilibre, par exemple, et dont on souhaite
optimiser le rendement. C’est notamment le cas pour la réaction
d’estérification, que nous aborderons en détail dans un autre chapitre. Elle
consiste à faire réagir un acide et un alcool, pour obtenir de l’eau et un
ester. Lorsque l’alcool est un alcool primaire, la réaction cesse lorsque 2/3
des réactifs ont réagi. On utilise alors un appareil de Dean-stark, qui extrait l’ester du milieu
réactionnel. On déplace ainsi l’équilibre vers la droite, ce qui permet d’augmenter
la quantité de réactif réagissant, et avec elle, le rendement de la synthèse.
2-3- déplacement d’équilibre :
Considérons un système chimique à l’équilibre. Si l’on
modifie la valeur de son quotient de réaction (en ajoutant au retirant une espèce
du milieu réactionnel, par exemple, ou bien encore en changeant la température,
ce qui change la valeur de K), le système n’est plus à l’équilibre : Qr≠K.
le système va donc réagir, et modifier les quantités de matière des réactifs et
des produits présents dans le milieu réactionnel, de manière à ce que Qr
retrouve une valeur égale à K. ce faisant, donc, on passe d’un système à
l’équilibre à un nouveau système également à l’équilibre, on dit que l’on a
déplacé l’équilibre.
Si la modification du système amène celui-ci dans un état où
Qr<K, le système va devoir consommer des réactifs et générer des
produits pour retrouver Qr = K,c'est-à-dire que la réaction va se
faire vers la droite. On dit alors que l’on a déplacé l’équilibre vers la
droite. A l’inverse, si l’on amène le système dans un état où Qr>K,
le système va devoir consommer des produits et régénérer des réactifs pour
retrouver Qr = K, c'est-à-dire que la réaction va se faire vers la
gauche. On dit alors que l’équilibre est déplacé vers la gauche.
Attention cependant au fait qu’une modification de l’état du
système n’entraîne pas forcément de déplacement d’équilibre. Ainsi, si l’on
ajoute par exemple un solide dans une solution qui en contenait déjà, la valeur
de Qr n’est pas modifiée, et le système ne réagira pas.